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Le Haut-commissaire, Dominique Sorain à Radio Tefana

Mardi 11 février 2020 -  Dominique Sorain, Haut-commissaire de la République en Polynésie française était l'invité du journal de Te Reo O Tefana pour aborder plusieurs sujets d'actualités. Rappelons que c'est le deuxième représentant de l'Etat au fenua à se présenter dans les studios de Tavararo après Adolphe Colrat en 2006. Dominique Sorain était interrogé par notre journaliste, Vaitiare NAUTA.

Il a été question de la visite du président de la République, Emmanuel Macron, prévue du 16 au 18 avril 2020 où il avait annoncé un "One Planet Summit", en quoi consiste ce forum?

"Le Président de la République viendra en Polynésie pour le forum des îles du Pacifique et surtout pour le One planet summit, ça a été mis en place par le président de la République lui-même, suite à la COP21.

C'est la rencontre des représentants du secteur public et privé pour apporter des solutions et des projets pour justement favoriser la lutte contre des évolutions qui sont nuisibles pour les territoires et notamment pour les îles du Pacifique, des problèmes de dérèglement climatique, de risque de montées des eaux, des modifications du climat, donc qu'est-ce-qu'on peut apporter comme solution pour ses territoires.

Et donc c'est une approche extrêmement pratique, la ministre Annick Girardin à parlé de sommet des solutions.

Les conclusions ne sont pas encore connues mais on va certainement parler de problèmes de recherche et de transfert de recherche pour protéger les coraux, ça peut être la question d'assainissement, les traitements des déchets, c'est le problème aussi des abris anticycloniques, donc ce sont des sujets pratiques qui vont être débattus à cette occasion, ça va rassembler des acteurs concernés sur l'ensemble de l'océan Pacifique."

L'état s'engage déjà sur ses sujets. Les interventions de l'Etat, c'est toutes cumules, ce sont les salaires, ça représente à peu près 188 milliards de francs. Dans ses domaines d'intervention l'Etat intervient au côté du pays et des communes pour des investissements qui permettent aux territoires de s'adapter et d'apporter des services à la population. Je parlais d'eau potable, d'assainissement, des subventions sont accordées par l'Etat dans le cadre de ce que l'on appelle le contrat de projet Etat-Pays.

Un sujet qui sera au cœur des discussions de la mission du président de la République Emmanuel MACRON. Le nucléaire, où en est la situation sur l'indemnisation des victimes?

"En matière d'indemnisation des victimes, nous étions au total à la fin de l'année 2019 à 138 dossiers traités dont 11 dossiers concernaient la période précédente 2017, ça signifie qu'entre 2017 et aujourd'hui, il y a eu 127 dossiers traités, il n'y a jamais eu autant de dossiers traités. Et d'ailleurs Alain Christnacht, président du CIVEN (comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires) était venu à la fin 2019 indiquer dans quelles conditions les dossiers pouvaient être déposés et que si il s'agissait de victimes directes ou d'ayants droit et pour inciter à ce que ses dossiers soient déposés.

On était dans une dynamique nouvelle en la matière où il y a jamais eu autant de dossiers.

Il y a cette décision du Conseil d'Etat qui est intervenue, et dit que tous les dossiers déposés avant la fin 2018 ne pouvaient pas se voir appliquer la nouvelle règle où il y a évoqué le taux d'un millisievert.

Il appartiendra au CIVEN dans les jours qui viennent parce qu'il s'agit d'une autorité administrative indépendante de déterminer quelle suite sera donné à cette décision du Conseil d'Etat.

Donc là il y a un cadre qui est bien connu et il faudra continuer à travailler sur cette indemnisation des victimes des essais nucléaires. L'autre volet concernant le centre de mémoire, un point important qui a fait l'objet d'un comité de pilotage au mois de novembre 2019 où la trajectoire a été bien clairement identifiée, il s'agit de créer ce centre de mémoires pas très loin du centre-ville de Papeete, dans l'ancienne résidence du commandant de la marine. Les transferts de propriétés et les travaux de préparations sont en cours. Il y a un marché qui a été passé avec un programmiste pour définir le contenu de ce centre de mémoires. Les premières conclusions seront déposées en début mars."

Le 02 octobre 2018, une plainte avait été déposée auprès de la cour pénale internationale, contre la France pour crime contre l'humanité. A quel moment la France va-t-elle prendre ses responsabilités sur le fait colonial et le fait nucléaire ?

"La France avait pleinement reconnu le rôle de la Polynésie dans la mise au point de l'arme nucléaire, je crois que les choses sont claires. Et toutes les autres décisions découlent de cela.

Solennellement, il peut pas y avoir plus solennelle qu'une loi. Pour ce qui est de l'Organisation des Nations Unies : il y a un statut d'autonomie qui existe ici, qui est pleinement appliqué et approuvé par la population. Ce n'est pas une minorité qui a voté pour les partis favorables à l'autonomie.

L'autonomie est une réalité dans le fonctionnement institutionnel du territoire , il y a eu les transferts de compétences qui ont été massifs pour le territoire. Il y a eu également un accompagnement très fort de l'Etat, c'est l'autonomie dans la République, outil de la solidarité républicaine. Quand je parlais de l'intervention de l'Etat qui sont très conséquents, c'est aussi une reconnaissance de cette spécificité Polynésienne. C'est la réalité démocratique."

Le conseil territorial de prévention de la délinquance avait adopté un nouveau plan 2018-2020 avec des priorités, lesquelles?

"En matière de délinquance, il faut dire que l'on a une stabilité voir une baisse de la délinquance dans les atteintes aux biens (les vols etc..). La délinquance violente d'appropriation crapuleuse c'est-à-dire on vous tape dessus pour vous prendre votre téléphone portable, il y en a très peu de cas par contre on a un certain nombre d'éléments dont nous nous préoccupons. Je vais citer l'ice, la consommation de drogue, il y a eu le paka qui était une consommation pas traditionnelle mais qu'on trouvait beaucoup en Polynésie française. Mais du paka on est passé à l'Ice, le phénomène s'accentue et c'est un phénomène de déstabilisation de notre société, des familles, des enfants et même de l'ensemble du tissu familial, ça déchire des familles. J'en parlais dernièrement avec un élu de Faa'a qui était intervenu dans ce comité territorial de la prévention. Il s'agit de lutter contre l'ice avec des moyens de répression, on a augmenté, on a formé des équipes de cynophiles (avec des chiens), lutter contre les réseaux, la justice condamne sévèrement.

Cela passe aussi par la prévention des services de l'Etat, du Pays et des communes, il faut allé dans les quartiers pour expliquer les méfaits et les conséquences de l'ice. Un très gros travail de prévention va être mené en la matière.

L'autre fléau que nous avons sur le territoire, ce sont les violences intrafamiliales, on a certainement les taux les plus élevés de notre Pays. Cela suppose un travail de répression et d'accompagnement des victimes. Les gendarmes sont formés pour accueillir les victimes qui déposeront plaintes. On simplifie les procédures de dépôt de plainte pour que les victimes ont accès plus facilement avec l'appui de la justice en la matière. Il y a d'autres techniques utilisées, les téléphones grand danger qui sont remis aux victimes pour se donner des alertes. Nous travaillons avec le Pays sur l'augmentation des places dans les foyers d'accueil. C'est un travail de fond qui doit se faire toute l'année, ça passe par l'Etat, le Pays, les communes, les associations mais aussi les églises, nous allons amplifier cela"

Radio Tefana est en tête dans les derniers sondages avec plus de 20% des parts de marché, elle est écoutée et suivie par près de 35 000 auditeurs par jour, et ce depuis plusieurs années. La justice a condamné Radio Tefana à une amende de 100 millions pour avoir dit la vérité durant 35 ans d'existence notamment sur le nucléaire, nous sommes pluralistes, la preuve vous être sur notre plateau aujourd'hui…Quelle est votre position face à ce coup de massue? Pensez-vous que l'Etat serait capable de fermer radio Tefana en particulier, et toutes les radios associatives comme l’avait préconisé à l’audience le procureur de la République ?

    "Aujourd'hui je suis radio Tefana, je vous invite régulièrement et vous êtes présent, mais je n'ai pas à commenter une décision de justice, nous sommes dans notre République, le juge prend des décisions et moi, autorité administrative je n'ai pas à commenter les décisions de justice qui sont rendues.

(D'après journal audio de la rédaction 2020-02-11)